Tu t'es pointé là, discrètement, à cet endroit que je déteste et qui en a déjà accueilli tant d'autres avant toi. Là, pile entre mes deux yeux. Tu étais tout petit au début, et rouge. Je t'ai pris pour un de ces petits boutons pas bien méchants qui ont fait surface de temps à autre, ces derniers mois. Des petits boutons inoffensifs que je pouvais neutraliser assez facilement. Une pommade le soir et hop, le matin, presque plus rien.
Mais sur toi, la pommade n'a pas agi. Non, le lendemain matin, tu étais là, plus gros, plus rouge encore que la veille. C'est quand je t'ai touché que j'ai compris : tu étais douloureux. Un gros bouton rouge et douloureux juste entre mes deux yeux. Un gros bouton d'acné. Un énorme, que dis-je. Comme avant. Comme les centaines d'avant. Comme je n'en avais pas eu depuis des mois.
Toi et moi, ça ressemblait à des retrouvailles entre deux vieux ennemis. J'ai su qu'avec toi, ce serait compliqué. Que tu serais de ces boutons qui mettent des jours à mûrir, contre lesquels on ne peut rien, que l'on peut à peine camoufler. Et pile pour le mariage de mon meilleur ami, en plus ! Heureusement que la maquilleuse était douée.
Parce qu'il paraît qu'il vaut mieux en rire.
Après des jours à devoir cohabiter avec ta tronche rougeaude de bouton pas sympa, j'ai cru que j'étais enfin débarrassée de toi. Tu t'es tapi, tu t'es fait discret. Mais non, huit jours après, il a fallu que tu remettes ça ! Pendant ma semaine de vacances en amoureux. La résurrection du Christ, c'était rien à côté. J'en ai serré les dents. J'en ai pleuré.
A nouveau tu es parti. J'espère que tu n'étais qu'une erreur, et pas un éclaireur, qui va dire à tous les autres : "Eh les gars, venez, c'est sympa ici, c'est déjà un champ de mine, la peau de cette fille ressemble aux cratères de la lune. On sera bien !" Saleté. Saloperie. Six mois, c'est ce qu'il avait fallu à mon acné pour revenir après ma deuxième cure de Roaccutane. Non, je ne me laisserai pas envahir. Je ne vous laisserai pas gâcher ma vie, encore. Cette fois, je vais agir vite. Je ne veux plus vivre ça, je ne peux plus. Laisse-moi tranquille, saleté d'acné, pitié, va-t'en pour toujours. Qu'est-ce qu'il te faut encore ? Tu n'en a pas eu assez avec moi ?
FOUS MOI LA PAIX.